Sortie shashliks
Nous devions faire ça la semaine dernière, mais le mauvais temps nous en a empêchés : c'est finalement aujourd'hui que nous sommes allés nous faire un petit barbec' entre amis avec nos chauffeurs. C'est un peu une tradition ici : les chauffeurs qui apprécient leurs employeurs s'improvisent cuistots une fois par an et leur préparent la spécialité locale, des shashliks, quelque part dans la nature.
Initialement, nous ne devions y aller qu'avec Iermann et trois amis, mais finalement, l'un de ces derniers recevant sa famille ce week-end, il nous fallait deux voitures, et leur chauffeur, Bulat, nous a donc accompagnés. On ne l'a pas regretté car il était très sympa, aussi Kazakh et agréable que Iermann.
Ils avaient choisi un endroit dans la montagne qui s'appelle Iessik, à environ deux heures de route de la ville. Tout y est prévu pour les barbecues, d'ailleurs, les gens du coin ne se privent pas d'en faire ! La route qui y mène donne le ton tout de suite : on s'arrête au bord pour acheter le bois nécessaire au barbecue...
Celle-là, c'est pour le folklore : il n'est pas rare de croiser ce genre d'attelage circulant tranquillement sur les bas-côtés, dès qu'on quitte la ville.
Sur place, au bord d'une rivière bien fraîche, plusieurs aires de ce type sont aménagées : ici, celle que nous avons choisie.
Le shashlik est une brochette de viande initialement originaire d'Ukraine, mais qui est populaire dans tous les ex-pays soviétiques. Lors d'une petite conversation avec Iermann et Bulat, j'ai appris que le "vrai" shashlik était fait uniquement de viande de mouton. Les autres viandes durcissent trop avec ce mode de cuisson. Voilà donc pourquoi j'avais trouvé les shashliks de certains restaurants trop durs.
Nos deux compères ont donc acheté une grande quantité de viande de mouton (foie, côtes...) hier au bazaar et l'ont faite mariner toute la nuit dans un mélange dont eux seuls ont le secret. Cru, ça donne ça (ici, Bulat) :
Ils préparent le feu selon une technique éprouvée, très différente de nos barbecues au charbon de bois :
Pendant la cuisson, on fait de petites entailles dans la viande et on l'arrose de vinaigre, ainsi elle s'imprègne bien :
Ah, le grésillement de la viande sur la braise... Que de poésie ! ^^
Et finalement, on déguste la grillade ainsi obtenue avec des oignons crus. Ca, c'est la version traditionnelle. C'était sans compter moi-même et nos amis qui avions mis un point d'honneur à ramener plein de bouffe : j'avais fait un cake aux olives et une salade, nos amis avaient ramené quelques spécialités japonaises (inari-sushis, pieuvre séchée...). Bref, on s'en est mis plein la lampe.
Pendant le déjeuner, non loin de nous, nous avons vu arriver une famille kazakhe avec un beau mouton roux. Ils se sont installés avec la bête sous l'abri voisin du nôtre. On n'a pas compris (ou pas voulu comprendre) tout de suite ce qui allait se passer, mais en fait, vous l'avez probablement déjà deviné : la famille a lié les pattes du mouton, l'a allongé, s'est réunie en cercle autour de lui pour prier, et un homme l'a égorgé au bord de la rivière. Il n'a pas crié, mais il a remué pendant quelques minutes. Quand il a cessé de bouger, hommes et femmes se sont réunis autour de lui, l'ont dépecé, et coupé en morceaux avec l'adresse de bouchers professionnels. Je ne vous dis pas le barbecue qu'ils se sont fait.
Personnellement j'étais médusée, je ne pouvais pas m'empêcher d'observer la scène, comme certains d'entre nous d'ailleurs. Ils s'en sont aperçus, et quand on s'est approché pour venir voir ça de plus près, ils nous ont accueillis très aimablement en nous proposant même de partager leur repas (malheureusement, on avait déjà presque terminé le nôtre...). On a donc eu droit à quelques précisions. Ce mouton était le leur. Il est tout à fait normal au Kazakhstan, dans les campagnes, d'organiser ce genre de festins. Iermann et Bulat nous l'ont confirmé en nous racontant que ça leur arrivait régulièrement. Découper la bête n'est pas difficile, contrairement aux apparences. On rince les intestins dans la rivière pour en faire des saucisses, et on fait griller tout le reste. L'histoire ne dit pas ce que l'on fait de la peau, mais j'imagine qu'elle trouve aussi son usage...
Une fois remis de nos émotions (la viande, je la préfère quand même morte que vivante ou entre les deux), on est partis pour une petite balade dans le coin, bien sympa au demeurant : en témoigne ce pont de singe chevauchant la rivière et qui mène à une montagne joliment vallonnée.
Comme vous pouvez le constater, la flore du coin rappelle celle des Alpes, mais avec un je-ne-sais-quoi de différent. Il y a aussi beaucoup de chevaux :
Et donc, logiquement, pour clore cette journée riche en découvertes, on a fait... du cheval. Enfin, ceux qui tenaient encore debout, car avec toute la bière et tout le vin qui avaient accompagné les shashliks, certains d'entre nous n'étaient plus vraiment en état de monter ! ^^
Iermann et Bulat, qui avaient carburé au thé, ont eu ainsi l'occasion de nous montrer que les Kazakhs sont vraiment des cavaliers émérites : ils nous ont fait une belle petite démonstration ! Eh non, les traditions ne se perdent pas !
Bref, une très belle journée, j'espère qu'on remettra ça l'année prochaine !